COVID 19 : LES FEMMES DE 50 ANS ET + SONT DÉJÀ LES GRANDES VICTIMES ÉCONOMIQUES DE LA PANDÉMIE

Morning Sun Edward Hopper
Illustration Morning Sun Edward Hopper

La crise du Covid-19 nous touche toutes et tous. Pourtant, l’histoire nous apprend une chose : les femmes de 50 ans et plus seront les grandes victimes de cette nouvelle pandémie

En temps normal, en Suisse, les personnes âgées de 50 ans et plus (tous sexes confondus) sont les plus touchées par le chômage de longue durée. A cet âge, il devient difficile de retrouver un poste et les conséquences d’une perte d’emploi peuvent être dramatiques. La situation des femmes est pire que celle des hommes. Selon une enquête de l’Office fédéral de la statistique on observe un surchômage des femmes (tous âges confondus) dans 11 pays de l’UE-27/AELE, dont la Suisse et la France. Pour les femmes de 50 ans, c’est encore plus marquant. Les chiffres montrés par l’étude du Bureau international du travail sont parlants : le taux de surchômage des femmes âgées de 40 à 54 ans est de 3,6% contre 2,8% pour les hommes.

Dans son livre consacré à l’économie de la longévité, Joseph F. Coughlin constate que, pour s’en sortir « Les femmes créent des sociétés de conseil, de nouveaux magasins (…) ». Certes. Mais cette nouvelle pandémie engendre une économie qualifiée d’ « économie de guerre » par Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire française. Dans cette configuration économique, il est difficile, voire impossible, de lancer de nouvelles activités professionnelles (à moins de proposer ses services sur Internet et encore).  

Ce que l’histoire nous enseigne

Un article paru dans The Atlantic se penche sur la crise Ebola dans trois pays africains en 2014 ; celle du Zika en 2015-6 ; et les récentes flambées de SRAS, de grippe porcine et de grippe aviaire. Le constat est accablant. Les universitaires qui ont étudié ces épisodes ont constaté qu’ils avaient des effets profonds et durables sur l’égalité des sexes. « Les revenus de tout le monde ont été affectés par l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest », a déclaré Julia Smith, chercheuse en politique de santé à l’université Simon Fraser, au New York Times ce mois-ci, mais « les revenus des hommes sont revenus à ce qu’ils avaient avant l’épidémie plus rapidement que les revenus des femmes ». Les effets de distorsion d’une épidémie peuvent durer des années, déclare encore Clare Wenham, professeur adjoint de politique de santé mondiale à la London School of Economics.

Au niveau individuel, les choix de nombreux couples au cours des prochains mois seront parfaitement justifiés d’un point de vue économique. De quoi ont besoin les patients en cas de pandémie ? De soins. De quoi ont besoin les personnes âgées qui s’isolent ? De soins. De quoi ont besoin les enfants qui ne vont pas à l’école ? De soins. Tous ces soins – ce travail non rémunéré – retomberont plus lourdement sur les femmes, en raison de la structure existante de la main-d’œuvre. « Il ne s’agit pas seulement de normes sociales concernant les femmes qui assument des rôles de soignantes ; il s’agit aussi de considérations pratiques », ajoute Mme Wenham dans l’article. « Qui est moins bien payé ? Qui a la flexibilité ? » Dès lors, les revenus de certaines femmes ne se rétabliront jamais.

Un futur sombre

Il est certain que la crise actuelle engendrera des licenciements massifs. Et que les premières victimes seront les femmes de 50 ans et plus. Elles seront nombreuses à perdre leur emploi actuel, celui qu’elles occupent depuis des années. Quand il sera temps de réembaucher, les employeurs se réfugieront, comme d’habitude, derrière des excuses pécuniaires, arguant qu’une personne de cet âge coûte cher en assurances sociales. Quid du coût pour la société qui devra assumer et soutenir, par le biais du chômage ou plus tard, des couvertures sociales, les laissées pour compte du monde du travail?

Face à la crise du Covid-19, l’avenir est sombre pour tout le monde. Mais, quoi qu’il en soit, les femmes de 50 ans et plus, déjà précarisées sur le marché de l’emploi en temps normaux, sont déjà les grandes victimes de cet événement sans précédent.

L’autrice, Marie-France Martinez, est journaliste suisse de presse écrite. Elle a également enseigné la sociologie des médias durant des années. Elle est la co-fondatrice de ZeBrigad.

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