RETRAITE : VERS UNE PAUPÉRISATION ACCRUE DES FEMMES SENIORS ?

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La revoilà. Après les élections régionales, Emmanuel Macron s’attaque au chantier délicat de la réforme des retraites. L’objectif ? Augmenter l’âge légal du départ à la retraite, pour relancer l’économie. Une réforme qui semble oublier l’âgisme qui complexifie l’employabilité des femmes passé 45 ans.

Le 30 juin dernier, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, avait assuré que la réforme des retraites serait bel et bien mise en place malgré les difficultés qui entourent cette proposition :  “Il y aura une réforme des retraites. La question n’est pas si, mais quand”. Une affirmation qui laisse peu de place aux alternatives pour les femmes seniors et actives, qui seraient sans doute les premières affectées par cette réforme.

Lors de son intervention télévisée très attendue le 12 juillet au soir, Emmanuel Macron a ré-évoqué l’idée de cette réforme. Toutefois, il a répondu aux questionnements de Gabriel Attal en annonçant que la réforme des retraites pourrait “être engagée dès que les conditions sanitaires seront réunies”. La date de lancement de la réforme est donc très incertaine au vu de la potentielle quatrième vague de contamination de Covid-19. La réforme semble être donc repoussée au plus tôt à 2022, laissant au président la possibilité de fonder son argumentation politique sur cette réforme pour les élections présidentielles à venir.

Un argument politique après la crise économique

Emmanuel Macron a pourtant affirmé le 28 juin dernier vouloir s’atteler de nouveau à “la mère des réformes” et dont l’objectif majeur serait d’asseoir les finances publiques de l’Etat. Dans le contexte pandémique et face aux difficultés d’emploi suscitées par la crise sanitaire, la réforme suscite évidemment le débat. Les embauches en 2020 ont en effet reculé de 26.9%.

La conséquence principale de la réforme des retraites se concrétiserait par le relèvement de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans. Deux petites années qui pourraient toutefois se révéler problématiques au regard de l’emploi des 45+. Selon Un sondage BVA, 66% des français seraient opposés à cette mesure, en cause l’employabilité passé 40 ans est aujourd’hui impactée par un âgisme sous jacent. Et les « revenus d’engagement réservés aux jeunes sans emploi ni formation » annoncés hier soir par le président augure d’un choix qui ne dit pas un mot de l’employabilité des seniors. Le mot n’est même pas prononcé.

Quid de l’employabilité des 45 + ?

L’âgisme omniprésent dans tous les domaines de la société est d’autant plus tangible dans le secteur professionnel. Ce phénomène a pour conséquence de considérer les individus comme inaptes au travail à raison de leur âge, offrant donc un privilège aux aux générations plus jeunes qui entrent sur le marché du travail. À cela s’ajoute le fait qu’employer un travailleur expérimenté coûte plus cher, un argument récurrent qui oublie la valeur de l’expérience en terme de productivité pour l’entreprise.

C’est pourquoi aujourd’hui, ce projet de  réforme crispe les travailleurs vieillissants. Selon une étude de WerkLab, 95% des travailleurs âgés de plus de 45 ans se sentent contraints de cacher leur âge à de potentiels employeurs lors d’entretiens d’embauche par peur de ne pas être choisis à cause de leur âge. Selon cette même étude, 63% des travailleurs de plus de 40 ans ont eu le sentiment que l’âgisme entrait en compte dans la prise de décision finale pour l’embauche. Des chiffres alarmants dans une perspective de hausse de l’âge de départ à la retraite.

Deux années qui comptent

Demander de travailler deux années supplémentaires peut s’avérer en réalité être deux années de difficultés à trouver un emploi. Parmi les chômeurs en 2018, 60.2% des plus de 55 ans subissaient une situation de chômage long (plus d’un an) contre 41.8% des 15-24 ans. Les individus de plus de 55 ans sont donc beaucoup plus vulnérables que les plus jeunes face au chômage long. La hausse de l’âge du départ à la retraite pourrait donc entretenir cette tendance, voire la renforcer.

Le report de l’âge de départ en retraite renforce la tendance (le temps partiel marqueur de l’emploi des femmes seniors), puisque le temps partiel s’amplifie aux âges avancés. L’emploi des femmes seniores serait alors de plus en plus à temps partiel.

Françoise Milewski – in » L’emploi des femmes seniores : une grande vulnérabilité » OFCE le blog 2020

Des softskills précieux

Pourtant, les cadres seniors sont reconnus comme des travailleurs qui peuvent apporter beaucoup à une entreprise. Disposant de capacités et de soft skills précieux les travailleurs plus âgés peuvent se révéler tout à fait attractifs pour les entreprises. Fidèles à leurs entreprises, ils présentent également l’avantage de la stabilité et de la connaissance qu’ils apportent à leur profession grâce à leur expérience. Une continuité fort appréciable dans un contexte de crise. En l’absence d’aides supplémentaires pour les travailleurs de plus de 45 ans, à savoir des formations supplémentaires, des quotas de “seniors” dans les entreprises ou la mise à mal des stéréotypes âgistes, la réforme des retraites représente une menace pour ces travailleurs.

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