DEAUVILLE : « JANE BY CHARLOTTE » DE L’UNE À L’AUTRE

Documentaire Jane by Charlotte

Présenté à Cannes hors compétition le documentaire de Charlotte Gainsbourg sur sa mère Jane Birkin a été projeté au festival américain de Deauville. « Jane by Charlotte » dessine un portrait intimiste par petites touches qui en dit autant sur la réalisatrice que sur son sujet.

Comment deux personnalités aussi pudiques peuvent-elles échanger sur la part la plus intime de leur personnalité ? L’exercice était risqué et Charlotte Gainsbourg y excelle pour son premier long métrage « Jane by Charlotte». Le documentaire est un kaléidoscope de scènes qui courent de scènes de concert de Tokyo à New York en s’attardant dans l’antre bretonne de Jane Birkin. D’emblée la réalisatrice donne le propos en préambule. « Te regarder comme jamais je n’ai osé te regarder ». Un exercice sur le fil que la fille résume ainsi, « On a toutes les deux une pudeur l’une en face de l’autre et je ne sais pas d’où elle sort ».

L’ombre de Kate Barry, La fille de Jane Birkin et du compositeur John Barry décédée en 2013 enveloppe parfois les confidences. La solitude, la culpabilité et la mort traverse les paysages. « C’est chiant les vacances toutes seule » ponctue sobrement l’interprète de « je t’aime moi non plus » en marchant sur la plage. Parfois, Charlotte délaisse l’interview et se saisit de l’appareil photo. Moments propices pour s’interroger sur son image et celle que l’on laisse au fil des ans. « A un moment donné, vous ne vous reconnaissez plus. A quel moment cesse-t-on de s’en soucier ? Je pense que je suis en train d’atteindre ce point d’indifférence. Il vaut mieux enlever ses lunettes comme ça tout est flou » philosophe Jane.

Pourquoi apprend-on à vivre sans sa maman ?

De ce flou physique qui ne prend forme qu’au toucher de son visage, la mère raconte comment toucher le corps adolescent de sa fille a été une envie irrépressible, une dernière fois. Une demande qu’elle formule et que Charlotte accepte. Savoir comment les corps grandissent lorsqu’on ne sait rien ou presque de ce qui habite l’esprit d’une enfant secrète. La caméra s’arrête toujours avant que les émotions deviennent trop intenses et basculent sur le quotidien, la visite d’un chiot non sevré ou une visite de la maison de Jane, incapable de se séparer d’objets. Chaque pièce recelle un bric-à-brac incommensurable qui affiche dès le jardin des objets cassés.

Retour à Paris, rue de Verneuil dans l’appartement aux murs noirs où vécut Serge Gainsbourg et laissé en l’état, prompt à se transformer en musée selon les voeux de Charlotte. Des parfums que Jane respire à nouveau, notant le changement de l’emplacement de certains meubles mais reconnaissant la vie telle qu’elle se déroulait. « C’est merveilleux, on dirait Pompéi » s’exclame-t-elle se rappelant dans une autre séquence filmé dans un lit au côté de Charlotte son passé d’insomniaque et la prise de somnifère dès l’âge de 16 ans.

De confidences en échanges se dessinent les contours d’une vie et d’un rapport mère fille fait d’admiration réciproque. « Pourquoi  apprend on à vivre sans sa maman, s’affranchir à tout prix, j’ai pas envie de m’affranchir » interroge Charlotte « alors que l’on a envie de se blottir ». Une phrase qui résonne en contre point des quêtes d’indépendance des filles qui oublient la précieuse sérénité des mères qui font confiance à la vie.

Laisser un commentaire

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.