BAC DE FRANÇAIS : ANDRÉE CHEDID EST UNE FEMME !

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Photo d’illustration

Consternés, les lycéens qui ont passé l’épreuve du bac de français le 17 juin, ont découvert à leur dépens qu’Andrée Chedid était … une femme. Avant de blâmer le manque de culture de cette génération, un coup d’œil sur les autrices au programme peut être un début d’explication.

Pour paraphraser Sibeth N’Daye, Andrée Chedid est une meuf, et qui plus est « dead ». Mais ces deux conditions sont-elles suffisantes pour justifier une pétition jugeant le sujet du bac de français trop difficile ? L’épreuve incriminée concerne les filières ES et S (l’honneur de la section littéraire est donc sauve pour le moment). Sur le thème « Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours » les candidats avaient pour composer 4 poèmes à leur disposition, écrits par 2 auteurs et 2 autrices. Alphonse de Lamartine, Yves Bonnefoy, Anna de Noailles et Andrée Chedid. Une parfaite parité sauf pour les lycéens qui ont assimilé cette dernière à un poète. Même sans connaissance, la présence d’un e supplémentaire au prénom masculin aurait pu les mettre sur la piste !

Andrée Chedid poétesse

Si Chedid évoque plutôt les auteurs compositeurs Louis et Mathieu (M pour les intimes), Andrée, leur mère et grand-mère n’est pas parvenue à devenir un prénom aussi connu auprès des jeunes générations. Pourtant, l’écrivaine née au Caire le 20 mars 1920 a composé une œuvre dont la notoriété a largement dépassé les frontières. Poète, romancière, autrice de théâtre, de nouvelles et de chansons, Andrée Chedid a exploré tous les registres de l’écriture. Installée en France dès 1946, elle se consacre à la littérature dans la langue française. « Pendant une quinzaine d’années, je n’ai écrit que de la poésie, puis je me suis mise à la nouvelle. Le roman, j’y suis venue beaucoup plus tard, je n’osais pas m’y risquer. J’aime la nouvelle parce qu’elle dit beaucoup en très peu de mots. Finalement, je n’aime pas tellement les mots ! » confiait-t-elle à Télérama en 2000, suite à la parution de son roman « Le message ».

Une œuvre considérable

Disparue à l’âge de 90 ans, elle laisse une œuvre résolument optimiste. « [Andrée Chedid] a créé un monde où des êtres en but au malheur, à la tragédie affirment toujours l’espoir d’un monde meilleur et font de la vie un bien précieux, une conquête. Face au consensus de la défaite et de l’abandon, son œuvre constitue une troublante exception » écrit en exergue d’une série d’émissions hommage le site de France Culture. Reconnue comme une autrice majeure, l’écrivaine a reçu le Prix Goncourt de la poésie en 2002. 18 romans dont « le Message » qui porte l’espérance de l’amour dans un pays en guerre et « Le 6ème jour » porté à l’écran par Youssef Chahine cohabitent avec une abondante poésie réunie au sein de 2 volumes. « Textes pour un poème » 1949-1970, « Poèmes pour un texte » 1970-1991.

« L’effet Matilda » dans les programmes

Alors comment expliquer le désarroi des lycéens ? En examinant les œuvres littéraires au programme du bac. Et plus particulièrement la place dévolues aux autrices. Elles ne sont que rarement sur la liste à étudier. Sur les 12 œuvres proposées pour le bac 2020, seules deux ont été écrites par des femmes ! Madame de Lafayette et Marguerite Yourcenar pour les séries générales, Madame de Lafayette et Nathalie Sarraute pour la filière techno ! Une permanence dans l’invisibilisation des écrivaines, victime de « l’effet Matilda ». Pourtant depuis quelques années des demandes s’expriment pour que les textes des femmes de lettres figurent dans l’ensemble des programmes. En 2016, une enseignante avait lancé une pétition « pour donner leur place aux femmes dans les programmes de littérature du bac L ». Et pourtant comme le soulignait déjà en 2015, l’illustratrice Maureen Wingrove sur son blog, « des femmes auteurs qui déboîtent, il y en a eu plein » !

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