EN ARGENTINE DES FEMMES DÉNONCENT UN « TERRICIDE »

terricide Argentine
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Après avoir parcouru près de 2000 kilomètres à pied, des femmes argentines autochtones sont arrivées samedi à Buenos Aires. Elles dénoncent l’accaparement des terres et la destruction des écosystèmes sur leurs territoires.

« Basta de Terricididio » (Marre du « terricide »). C’est ce slogan que clament depuis plusieurs semaines des dizaines d’Argentines indigènes qui ont décidé de dénoncer l’accaparement des terres. Samedi, elles sont arrivées à la capitale, Buenos Aires, après avoir marché près de 2 000 kilomètres. 

Sur place, elles ont fait brûler des fleurs médicinales rapportées de leurs territoires, pour soigner les maux de la société. « En ces temps de crise systémique, nous devons retrouver une relation harmonieuse avec la nature. Valoriser la médecine ancestrale. Car on ne pourra pas produire de vaccin contre le « terricide«  », raconte l’une d’elles à RFI. 

Ce « terricide », c’est l’agression systématique de la nature, qu’elles subissent en premier lieu. En Patagonie, à cause de certaines activités humaines, les incendies se multiplient, l’agriculture intensive contribue à la désertification des sols et des grands projets miniers détruisent les écosystèmes. 

Un modèle de société alternatif au capitalisme

Ces femmes appartiennent au Mouvement des femmes indigènes pour le bien-vivre, dont Moira Millan est la figure la plus emblématique, qui fait partie de la communauté des mapuche. Ensemble, elles réclament la récupération des terres appartenant aux 36 nations d’origine du pays et la reconnaissance par l’État argentin des exactions commises à l’encontre des populations autochtones. Elles militent aussi pour la promotion d’un modèle de société alternative au capitalisme, le « « Buen Vivir » (ou « Sumak Kawsay » en langue quechua).

Le « Buen Vivir » propose que le lien entre les humains et la nature soit la valeur centrale de la société. Pour que les liens d’interdépendance soient reconnus et respectés. Pour que les humains ne se perçoivent pas en maître vis-à-vis de la nature et de cherchent pas à la dominer et à l’exploiter. Les communautés indigènes d’Amérique latine considèrent en effet la terre, surnommée la Pacha Mama, comme un individu à part entière, dotée d’une âme. Le « Buen Vivir » prône également les valeurs d’égalité, de redistribution, de respect de la diversité. 

Une lutte aux atours écoféministes, sans l’étiquette féministe 

Ce qu’incarnent ces femmes les rapproche d’autres luttes écoféministes, qui lient l’oppression des femmes à l’oppression de la nature, par le biais du patriarcat et du capitalisme. Moira Millan se défend pourtant de l’étiquette féministe, car elle estime que le « féminisme est une construction anthropocentrique » des cultures occidentales, comme elle l’a déclaré samedi au site argentin et féministe Marcha. 

Avant l’arrivée des Européens, « il y avait une reconnaissance de plusieurs genres, car le monde spirituel mapuche et celui des peuples autochtones sont extrêmement profonds et non binaires »« Si nous assumons une identité féministe, nous réduisons notre vision en tant que femmes indigènes », ajoute-t-elle. Pour elle, la lutte contre l’accaparement des terres et le patriarcat est donc avant tout une lutte anticoloniale et antiraciste.

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