Halla héroïne quinquagénaire part en guerre contre les usines d’aluminium qui pollue les Hautes Terres Sauvage de son île. Avec Women at War le réalisateur islandais Benedikt Erlingsso porte l’urgence écologique dans une fable iconoclaste poétique et engagée. Et dresse le portrait d’une femme libre.
Un arc à la main Halla (l’actrice Halldora Geirhardsdottir) parcourt la lande islandaise pour détruire les pylônes à haute tension qui alimente l’industrie locale de l’aluminium en électricité. C’est le point de départ de Woman at War conte écologique du réalisateur auteur de Des chevaux et des hommes (2013). Benedikt Erlingsso explique « Nous devons comprendre collectivement que la nature possède un droit intrinsèque et une nécessité d’exister, en dehors de nos besoins humains ou du système économique ». Pour ce faire sa messagère est une femme ordinaire dont le quotidien est dévolu à l’enseignement du chant. Halla n’est pas une « Katniss Everdeen » (Hunger Games) super héroïne aux prises avec une dictature meurtrière. Bien que l’on pourrait filer la métaphore tant le combat écologique nourrit les appétits des lobbys tout puissants.
Une héroïne multiple
Woman at War relie la défense de la terre à la quête de la maternité. Car si Hella recourt au sabotage elle est aussi dans l’attente d’une adoption qui prend le visage d’une jeune orpheline ukrainienne. Au moment où elle se prépare à accomplir son ultime attaque tombe la lettre qui concrétise son nouveau statut de mère. Cette dimension extirpe le film d’une classification unique. Film d’action, musical ou même comédie le mélange des genres porte la réflexion écologique. Un orchestre jouant la musique du film apparait au milieu de scène comme un choeur grec. Anachronique le réalisateur aime dérouter. Son héroïne recherchée par toutes les forces de police joue les justicière masquées façon Marvel. Mais aussi auprès d’une soeur jumelle professeur de yoga qui ignore tout de son activisme.
On en arrive à des situations où les défenseurs de l’environnement sont les ennemis de l’État. Benedikt Erlingsso
Une actrice de théâtre
Prix du public de la Semaine de la Critique au festival de Cannes 2017 le film traduit l’obsession du réalisateur pour le réchauffement climatique. Et l’urgence de trouver une solution. « Ce film vise à être un conte héroïque se déroulant dans notre monde où la menace est imminente. Un conte héroïque à la manière d’un récit d’aventure. Un conte de fée sérieux mais raconté avec le sourire ». Halldora Geirhardsdottir incarne une héroïne peu conventionnelle à laquelle elle n’a eu aucune difficulté à s’identifier. « Se battre pour les générations futures ou pour la terre est le même combat ». Le réalisateur évoque « sa puissance naturelle ». Et la compare sans hésiter à Sarah Bernard. « C’est l’ACTRICE de notre génération ».
Une activiste pas une terroriste
Benedikt Erlingsso a été inspiré par les activistes Berta Cáceres du Honduras et Yolanda Maturana de Colombie. « Ces deux défenseur(e)s de l’environnement luttaient pour la vie même et en raison de leurs actions, elles ont été assassinées par des forces obscures qui avaient des intérêts pour les terres qu‘elles défendaient ». Hella n’est pas une terroriste. « Quoi qu’il puisse arriver elle fera quelque chose pour changer le monde » explique Halldora Geirhardsdottir à Canal +. Une héroïne que le réalisateur n’hésite pas à comparer à Rosa Luxemburg. Et qui se doit d’être aussi charismatique que les paysages islandais, l’autre personnage central du film.
Woman at War de Benedikt Erlingsson (Kona Fer, Islande, 1h41). Sortie le 4 juillet 2018.
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