Les partis conservateurs et d’extrême droite des différents pays de l’UE font une percée dans les sondages pour les élections européennes, qui auront lieu ce 9 juin. Or ces partis menacent les droits des femmes, ainsi que l’une de leurs priorités : la lutte contre la crise climatique, dont elles sont les premières victimes.
229 millions de femmes vivent dans l’Union européenne, selon l’institut européen de statistiques Eurostat. Elles sont même 5 % de plus que les hommes sur ce grand territoire. Comment le Parlement européen va-t-il chercher à garantir leurs droits et à répondre à leurs préoccupations lors des cinq prochaines années ? L’enjeu est crucial avec le prochain scrutin des élections européennes de ce 9 juin. Pour l’instant, la progression des différents partis d’extrême droite et conservateurs dans les intentions de vote n’est pas une bonne nouvelle pour les femmes.
« L’essor des idées antidémocratiques présente un risque pour les droits des femmes et leurs priorités, telles que la lutte contre l’accélération du changement climatique et la protection de la nature », a partagé dans une analyse récente l’organisation SHE Changes Climate. Le mouvement, créé il y a quatre ans en réaction au manque de femmes dans l’organisation de la COP26, milite depuis pour la parité dans les négociations internationales climatiques, pour mettre en valeur les actions des femmes dans le domaine de l’écologie et lier les préoccupations climatiques des femmes à la défense de leurs droits.
Les droits des femmes en danger
Dans l’Union européenne, les droits des femmes sont déjà malmenés. En Hongrie ou en Pologne, l’accès à l’avortement s’est durci au cours des cinq dernières années. Dans le pays de Victor Orbán, les femmes souhaitant pratiquer un avortement doivent désormais écouter le battement de cœur de leur fœtus, dans le souhait de les faire renoncer à aller au bout de la procédure. Dans celui dirigé par Andrzej Duda, il n’est possible d’accéder à l’avortement qu’en cas de viol, d’inceste ou de mise en danger de la vie de la femme. En Italie, le gouvernement de Georgia Meloni a réduit de 70 % les financements du fonds de prévention de la violence contre les femmes. Le point commun entre les dirigeant·es de ces pays ? Représenter des partis d’extrême droite ou très conservateurs. Des partis dont plusieurs représentant·es cherchent à se faire (ré)élire au Parlement européen.
Côté français, si l’affichage peut parfois sembler favorable, les votes des député·es RN au Parlement européen ne laissent place à aucun doute sur leurs positions antiféministes, comme l’a analysé le collectif Grève féministe. Les élu·es RN se sont abstenu·es sur l’introduction de l’avortement dans la Charte européenne des droits fondamentaux ou sur l’adoption de la Convention d’Istanbul relative à la prévention de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Ils ont également voté contre une résolution prévoyant des formations contre le harcèlement sexuel au sein des institutions de l’UE et se sont abstenus sur le vote d’une directive visant à appliquer l’égalité salariale entre femmes et hommes pour un travail identique ou de même valeur.
Les femmes premières victimes du changement climatique
Le point commun de ces partis, c’est aussi d’afficher des ambitions très au rabais face enjeux de la crise climatique, voire d’avoir des points de vue climatosceptiques. Or les femmes sont plus affectées que les hommes par les effets du changement climatique, comme le démontrent plusieurs études scientifiques. Lors des canicules par exemple, leur mortalité est plus élevée que celle des hommes et les complications plus importantes en cas de grossesse. « Les femmes sont souvent les premières victimes du changement climatique, et lorsque celui-ci s’intensifie, il exacerbe toutes les mauvaises pratiques, y compris les violences faites aux femmes, décrit Alice Durand-Réville, présidente de SHE Changes Climate France. Si on ne lutte pas contre le réchauffement climatique, derrière il y a des impacts pour les droits des femmes. Il est donc crucial de mettre l’écologie au cœur des politiques européennes. »
Les femmes d’ailleurs ont bien compris les enjeux de la crise climatique et sont prêtes à agir pour y faire face. Selon un sondage mené par Euronews en 2023, 55 % d’entre elles plaçaient la lutte contre le changement climatique dans leurs priorités, contre 40 % des hommes. Selon le baromètre du Women’s Forum sur l’équité entre les genres, les femmes recyclent aussi plus que leurs homologues masculins, achètent plus local et réduisent davantage leur consommation d’eau et de viande.
Des droits et des priorités pour les femmes que le résultat des élections européennes peut soutenir ou au contraire laminer. Pour Alice Durand-Réville, les élections européennes représentent donc « le moment pour les femmes de démontrer leur leadership écologique ». « Il y a peu d’occasions de montrer à quel point les thématiques écologiques et le changement climatique nous tiennent à cœur. En allant mettre un bulletin dans l’urne, les femmes peuvent rappeler que ces préoccupations sont importantes pour elles. »