La ménopause concerne 14 millions de femmes en France, mais reste un sujet tabou. Une mission parlementaire inédite vise à briser le silence, à améliorer la prise en charge médicale et à intégrer cet enjeu dans les politiques publiques et professionnelles.
Le 18 octobre 2024, coïncidant avec la Journée mondiale de la ménopause, le ministère de la Santé a annoncé une avancée majeure pour les femmes en France : le lancement d’une mission parlementaire exclusivement dédiée à ce sujet. Une initiative qui a pour ambition de lever les tabous, d’améliorer la prise en charge médicale et sociale, et de mieux comprendre les conséquences de cet enjeu de santé publique. Portée par la députée Stéphanie Rist, membre de la commission des Affaires sociales, cette mission est accueillie avec beaucoup d’espoir par les associations féministes et les collectifs engagés.
Chaque année, en France, ce sont 500 000 femmes qui entrent progressivement dans la ménopause. Pourtant, ses conséquences sur la santé physique et mentale restent largement méconnues, même au sein du corps médical. Bouffées de chaleur, troubles du sommeil, baisse de la densité osseuse, ou encore risques accumulés de maladies cardiovasculaires : les symptômes sont nombreux et impactent la vie quotidienne des femmes, souvent sans qu’elles osent en parler. Une récente enquête de l’Institut National de la Santé (INSERM) a révélé que 87 % des femmes ménopausées ressentent au moins un symptôme handicapant, mais seulement 30 % d’entre elles consultent un professionnel pour y remédier.
Un enjeu de santé et de société trop longtemps ignoré
La mission, confiée à la députée Stéphanie Rist, membre de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, s’articule autour de trois axes principaux :
- Mettre en lumière les symptômes et conséquences de la ménopause sur la vie quotidienne et la santé physique et mentale des femmes. En effet, 87 % des femmes ménopausées présentent au moins un symptôme en plus de l’arrêt des règles.
- Renforcer l’approche préventive en sensibilisant les femmes et les professionnels de santé aux enjeux de la ménopause, afin de favoriser une détection précoce et une prise en charge adaptée.
- Éclairer le gouvernement sur la prise en charge sanitaire actuelle de la ménopause , en identifiant les lacunes et en proposant des améliorations pour une meilleure prise en charge des femmes concernées.
Le 18 novembre 2024, la députée Stéphanie Rist a donné le coup d’envoi des auditions dans le cadre de cette mission parlementaire. Médecins, chercheurs, associations de patients et collectifs féministes ont été conviés à partager leur expertise et leurs propositions. Parmi les premières interventions, la professeure Florence Trémollieres et Geneviève Plu-Bureau pour le Groupe d’Etude sur la Ménopause et le Vieillissement hormonal (GEMVI) se sont exprimées. Ces consultations visent à construire une feuille de route détaillée et à prioriser les besoins urgents. Les auditions permettent également de poser un regard critique sur les inégalités dans l’accès aux soins et d’imaginer des dispositifs concrets à intégrer dans les politiques publiques et professionnelles.
Les associations comme le collectif All for Menopause, saluent l’initiative, mais insistent sur l’urgence de mettre en oeuvre des actions concrètes telles que proposées dans leur manifeste. L’un des problèmes majeurs soulevés est le manque de formation des professionnels de la santé. En effet, nombre de généralistes et gynécologues ne sont pas suffisamment informés sur les traitements hormonaux et les alternatives naturelles, laissant les patientes sans réponses adaptées. De plus, elles pointent une inégalité dans l’accès aux soins, certaines femmes hésitent à consulter en raison des coûts ou de l’absence de prise en charge par leur santé complémentaire.
L’impact de la ménopause au travail
En France, le prix en compte de la ménopause en milieu professionnel est encore à ses débuts, contrairement au Royaume-Uni où certaines entreprises ont mis en place des dispositifs structurés comme le « passeport ménopause ». Ce dernier formalise un soutien clair aux employées concernées, avec des actions spécifiques telles que des ajustements d’horaires ou des formations pour les managers. En France, bien que le concept de passeport ménopause ne soit pas encore déployé, des initiatives émergentes : sensibilisation, collaboration avec des startups spécialisées dans la santé féminine, ou encore intégration progressive de ce sujet dans les politiques de bien-être au travail. Ces démarches restent cependant isolées et peu formalisées, témoignant d’une prise de conscience encore timide mais croissante sur l’importance d’accompagner les femmes durant cette étape de leur vie professionnelle.
Les conclusions de cette mission devraient être rendues au printemps 2025. Pour les femmes de 45 ans et plus, ce travail parlementaire représente bien plus qu’un effort institutionnel : il symbolise la reconnaissance d’une réalité qui impacte leur quotidien depuis trop longtemps dans l’ombre. Si cette initiative tient ses promesses, elle pourrait marquer un tournant dans la prise en charge de la santé des femmes en France et, espérons-le, ouvrir la voie à un changement de mentalité durable.