Le 15 mai 1991 Edith Cresson devenait la 1ère et unique femme Première ministre d’un gouvernement français. Nommée par François Mitterrand, son entrée à Matignon laissait augurer d’une ère propice pour les femmes en politique. Un leurre 30 ans plus tard.
L’effet d’annonce passé, la nomination d’une femme à ce poste prestigieux n’aura été qu’un feu de paille. Edith Cresson aujourd’hui âgée de 87 ans a occupé la fonction de Première ministre dix mois. Un temps suffisant pour illustrer le sexisme en politique. Pourtant, celle qui est tour à tour ministre de l’Agriculture, du Commerce extérieur et du tourisme puis des Affaires européennes connait bien les affaires publiques. Et devient la cible d’une classe politique patriarcale.
Invitée en décembre 2019 par le réseau normand Femmes & Challenge, Edith Cresson témoigne de ces attaques sexistes incessantes. Sur scène elle livre les petites phrases assassines qui ont accompagné son parcours. «Quand en 81, François Mitterand a été élu, il m’a demandé d’être ministre de l’agriculture et là, qu’est ce que j’ai entendu ! Le président de la FNSEA a dit : on voit le mépris dans lequel le Président de la République tient l’agriculture puisqu’il a nommé une femme à ce poste».
«Un nouvel élan» avec Edith Cresson
Pourtant François Mitterrand souhaite avec cette nomination donner « un nouvel élan » à son second septennat marqué par son antagonisme persistant avec son Premier ministre Michel Rocard. Edith Cresson accède aux responsabilités dans un climat sexiste. «Voilà la Pompadour» persiffle François d’Aubert alors Ministre de la Recherche. «À ma connaissance, la Pompadour n’a jamais été élue. Moi j’ai été élue députée, maire, conseiller général et cinq fois ministre.Le suffrage universel ne suffit pas à conférer la légitimité à une femme» regrette Edith Cresson.
Mais la sphère politique n’est pas seule en cause dans ce « bashing ». Dès son discours de politique générale, les médias raillent sa voix trop aïgue. «La France sort soudain de sa torpeur mitterrandienne pour s’attacher à l’essentiel : le tailleur à carreaux d’Édith… jugé peu seyant, ses boucles d’oreilles, clinquantes, son «taux de féminité», bas» écrit dans Libération Valérie Voyer, militante Insoumise. Représentée au «Bébête show» sous les traits d’une panthère «Amabotte» achève de la ridiculiser.
Le pouvoir toujours masculin
Si elle s’en offusque, les commentateurs lui reproche son manque d’humour. Le manque de son soutien de son proche parti complète le portrait d’une femme politique qui essuie les platres du sexisme en politique. Edith Cresson fondatrice des Ecoles de la 2ème chance en 1995 concluait le Forum normand par ces mots : «L’apparence du pouvoir est important pour les hommes. Le pouvoir est masculin».