Anne Géneau, présidente des Petits Frères des Pauvres, alerte sur la précarité et l’isolement des aînés, des réalités souvent invisibles. En cette Journée de lutte contre la précarité énergétique, il est bon de rappeler son message qui invite à bâtir une société plus inclusive, où le vieillissement rime avec dignité et lien social.
Les Petits Frères des Pauvres se sont donné pour mission de soutenir les personnes âgées les plus précaires et isolées, car ces deux facteurs forment une spirale d’exclusion. « Nous avons une mission de plaidoyer que nous assurons », explique Anne Géneau, Présidente de l’association. « Notre slogan, « Non à l’isolement de nos aînés », représente notre engagement pour briser cet isolement au quotidien. »
Dans le cadre de leur mission, les Petits Frères des Pauvres accompagnent les personnes âgées sans-abri dans un parcours de relogement pour sortir de la précarité. Comme le rappelle Anne Géneau, « nous avons des équipes qui accompagnent les personnes en grande précarité, parfois venant de la rue, dans un parcours qui passe par l’hôtel, la pension de famille, jusqu’à une location stable. ».
Inclusion urbaine et lien intergénérationnel : des défis de société
Penser l’inclusion des personnes âgées dans l’espace public est primordial souligne Anne Géneau. « Il faut créer une ville pour tout le monde », le vieillissement doit être vu sous un angle inclusif. L’urbanisme, la mobilité, et même la présence de bancs publics sont autant d’éléments qui impactent directement la vie des personnes âgées. « Si vous pensez à une ville avec des chemins adaptés pour les balades mais que vous enlevez tous les bancs, sous prétexte qu’ils sont utilisés par les jeunes qui font du bruit, vous ratez quelque chose » ajoute-t-elle. Une approche de « vivre ensemble » dans les villes, qui doit intègrer d’autres dimensions comme l’urbanisme par exemple.
L’association défend également le renforcement des liens intergénérationnels. « Je n’aime pas trop l’idée de mettre des Ehpad à côté des crèches, c’est très réducteur. Sans une véritable animation entre les deux, il ne se passera rien. Il faut créer du lien intergénérationnel, sans quoi on n’arrivera jamais à vivre ensemble. Le sentiment d’utilité est crucial, tout comme l’accessibilité à une mobilité adaptée pour permettre aux aînés de continuer à s’investir dans la vie de la cité, même avec une canne. » Ces liens permettent de transmettre aux plus jeunes tout en restaurant un sentiment d’utilité pour les plus âgés. Il est essentiel de comprendre qu’une personne âgée n’est pas simplement un « objet de soin » précise-t-elle.
Vers une société plus inclusive
Anne Géneau souligne que la fracture numérique renforce la mise à l’écart de nombreux seniors, déjà en situation de précarité. « Beaucoup sont exclus parce qu’on les contraint à utiliser des outils qu’ils ne maîtrisent pas. Les gens savent utiliser un téléphone, prendre une photo, mais remplir un document administratif, c’est autre chose », analyse-t-elle. Pour remédier à cette inégalité discriminante, elle propose des solutions concrètes, comme la mise en place d’ateliers numériques intergénérationnels où jeunes et aînés pourraient apprendre ensemble. « Il faut aussi remettre de l’humain dans les points d’accueil, pour accompagner les personnes », insiste-t-elle, pointant la nécessité de recréer du lien social dans un monde de plus en plus dématérialisé.