LA RABBIN DELPHINE HORVILLEUR : TROUVER LES MOTS JUSTES POUR PARLER DES MORTS

Delphine Horvilleur
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La rabbin Delphine Horvilleur célèbre la puissance de la vie dans son dernier livre  » vivre avec nos morts » (Edition Grasset) . Une apparente contradiction qu’elle a dissipé lors d’une conférence aux Franciscaines de Deauville. Avec une question centrale, comment parler des morts, trouver les mots justes ? Un voyage qui parle de religion, de philosophie et de blagues juives.

Membre du comité scientifique des Franciscaines, le nouveau lieu multiculturel de Deauville, Delphine Horvilleur a prolongé le voyage initiatique proposé par l’exposition inaugurale « Les chemins du Paradis ». Une parfaite cohérence avec son dernier livre « Vivre avec les morts ». Savoureuse conférence qui redessine la place que l’on doit aux morts et aux histoires que l’on tissent à leur propos. D’emblée la rabbin donne le ton. « la Bible nomme l’après-vie le shéol, terme qui signifie « la question ». Quand on meurt, on tombe dans la question ».

Savoir si le paradis est à portée de main n’est donc plus le sujet. N’attendez pas de réponses sur la mort auprès de Delphine Horvilleur. Si les autres religions monothéistes décrivent le monde d’après avec la promesse du paradis, la religion juive n’apporte que d’autres questions. Le grand mérite de la mort est d’ancrer le défunt dans une filiation. La question de la transmission est essentielle poursuit la philosophe. Et pour ce faire, quoi de mieux que de raconter la vie du défunt ? Mais que dire interroge l’écrivaine. « Trouver le mot juste est l’exercice le plus difficile. Car les vies peuvent se raconter de plein de manières, comme une tragédie grecque, une comédie romantique, un western, par la fin ou par le début ? ».

Le sens des mots

Et si raconter commence toujours par des mots, chacun d’entre eux n’ont pas la même signification. Le cimetière, maison des morts chez les catholique devient la maison des vivants dans la religion juive. Rien n’est plus hasardeux que de décrire ce qui attend les défunts après. Delphine Horvilleur pointe dans une interview au Monde les mutiples champs des possibles. « Certains défendent l’idée de la résurrection des morts à l’heure où le Messie viendra ; d’autres, celle d’une forme de réincarnation – dans la mystique juive –, l’idée de repos au jardin d’Eden, celle que l’âme survit au corps et rejoint le créateur dans les sphères célestes… Toutes ces idées existent et cohabitent (…) ».

 Le discours se fait plus léger lorsque la conférencière évoque Moïse terrifié à l’idée de mourir. La directrice de la rédaction de Tenou’a rappelle que célébrer la vie revient à espérer une longévité de 120 ans, âge supposé de la mort du premier prophète du judaïsme. « Que dit-on à quelqu’un qui a 120 ans ?  Bonne journée ! » s’amuse-t-elle. Et pour ne pas laisser « la mort avoir le dernier mot », Delphine Horvilleur aime l’idée de la consolation, celle que l’on offre aux enfants le soir avant de s’endormir. « Il faut aussi raconter à un enfant à quel point les adultes sont maladroits avec les mots et à quel point on ne sait pas parler de la mort. Mais seulement dire qu’on sera la pour l’accompagner ».

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