FAUT-IL SE RÉJOUIR DU DÉFILÉ FÉMINISTE DE DIOR ?

Capture Twitter defile DIOR 2020
Capture Twitter defile DIOR 2020

Sous la houlette de Maria Grazia Chiuri, directrice artistique de la maison Dior, la collection prêt-à-porter automne hiver a défilé dans une scénographie balisée de slogans féministes. Une caisse de résonnance bienvenue ou une opération marketing recyclant les luttes des femmes ?

Le décor affiche les couleurs, celles du féminisme interprété par l’artiste Claire Fontaine qui a réalisé l’installation. Au sol, des reproductions de pages du quotidien « Le Monde », au plafond des enseignes lumineuses, néons rouges, verts, jaunes affichent des punchlines clignotantes. « Women raise the upraising » – les femmes élèvent le niveau – , « when women strike the world stops » – quand les femmes frappent le monde s’arrête – « Patriarchy = CO2 » , »we are all clitoridian women » – nous sommes toutes clitoridiennes – Une référence à la féministe Carla Lonzi, fondatrice du collectif féministe Rivolta (et/ou à Freud ?).

Un défilé qui a la fibre féministe

Une mise en scène des résistances des femmes. Message phare du défilé, « Consent » rappelle la publication médiatique de « Consentement », le récit de Vanessa Springora sur sa relation avec Gabriel Matzneff. Maria Grazia Chiuri poursuit la déclinaison de sa fibre »féministe » lancée avec des tee shirts à 550 € proclamant « we shoud all be feminist » lors de son premier défilé pour la marque de luxe en 2016. La reprise du slogan titre d’une conférence de l’activiste nigériane Chimamanda Ngozi Adichie avait créé le buzz et remplit le tiroir caisse. Se revendiquer féministe a un coût semble-t-il.

feminism washing

Sans préjugé de la qualité de la collection, de nombreux internautes s’interrogent sur cette mode qui recycle le féminisme. Sur Twitter, Jennifer Padjemi, fondatrice de la newsletter What’s Good tacle le défilé. « Dior a fait un show dans un décor « féministe » and I think que ce sont des forceurs. Quand on vous dit que le féminisme est devenu un outil marketing, on vous parle exactement de ça ». D’autres ne manquent pas de souligner un discours d’engagement porté uniquement par de jeunes femmes blanches et minces. « Ou est la diversité ? ». La version consumériste du féminisme pourrait-elle avoir cependant un impact positif en dehors du catwalk ?

Le mariage du luxe et du féminisme

Le mariage du luxe et du féminisme ressemble à celui de la carpe et du lapin. A moins que la mode ne soit le contexte idéal pour exprimer les tensions de la société. Sur son site LVMH décrit « Le défilé, organisé au cœur du Jardin des Tuileries, illustre l’engagement féministe de Maria Grazia Chiuri à travers l’inscription du message « I Say I » à l’entrée. Symbole de l’affirmation de soi et de la volonté de la Maison Dior d’explorer les multiples facettes de la subjectivité féminine ». Au coeur du spectacle, les luttes prennent un tour glamour, oubliant par ailleurs les revendications majeures des femmes qui (la majorité) qui sont exclues d’une norme physique irréelle (taille 34). A moins de considérer que le féminisme n’est plus une revendication osée mais un état d’esprit qui ne devrait même pas être source de commentaires. (on en est loin).

Les défilés se nourrissent des évolutions et combats sociétaux. Coco Chanel et Yves Saint Laurent ont libéré les femmes en abolissant leurs carcans vestimentaires. Révolutionnaires à ‘époque ! Aujourd’hui il serait plus impactant de bouleverser les codes d’un patriarcat bien établi dans cdet éco système : mannequins anorexiques, conditions de production encore peu éthique … C’est à ce vaste chantier que doit s’attaquer la mode si elle veut que ses shows « féministes » puisent servir de modèles contre les stéréotypes et injonctions faites aux femmes. Allez encore un effort !

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