VALENTINA PETRILLO, 51 ANS, PREMIÈRE ATHLÈTE TRANSGENRE DES PARALYMPIQUES

Valentina Petrillo
© © Marco Mensa – Ethnos

À 51 ans, Valentina Petrillo, la sprinteuse italienne et athlète transgenre, atteinte d’une déficience visuelle, concourt à Paris aujourd’hui et vendredi dans le cadre des Jeux paralympiques. Une première pour elle et pour l’organisation, après des années difficiles pour continuer à pratiquer sa passion dans la catégorie féminine.

Elle a 51 ans aujourd’hui et s’apprête à vivre son rêve d’enfant : participer à une compétition olympique. Cette semaine, Valentina Petrillo s’élancera sur la piste du 200 mètres et sur celle du 400 mètres femme dans la catégorie T12, pour les sportives atteintes de déficience visuelle. Une participation qui marquera les esprits, quel que soit le résultat final : l’Italienne est la première personne transgenre à concourir dans le cadre des Jeux paralympiques.

« Je vois le monde un peu différemment du reste des gens »

Depuis toute petite, Valentina est passionnée d’athlétisme. Son idole : Pietro Mennea, un sprinteur italien détenteur du record du monde du 200 mètres pendant dix-sept ans et champion olympique en 1980. Impossible pourtant de voir les lignes de démarcation des pistes aussi bien que lui. À l’adolescence, Valentina a reçu un verdict confirmant ses difficultés de vision. Elle est atteinte de la maladie de Stargardt : une dégénérescence maculaire génétique touchant environ 1 personne sur 9 000, qui provoque une vision floue dans l’axe du regard, altère la vision des couleurs et peut entraîner une hypersensibilité à la lumière ou une difficulté à s’adapter à l’obscurité.

« Je vois le monde un peu différemment du reste des gens, décrit-elle dans le documentaire 5 nanomoles, le rêve olympique d’une femme trans, sorti en 2023. Heureusement, cette situation ne m’a pas empêchée de travailler en tant que programmatrice informatique, de pratiquer le sport que j’aime – l’athlétisme – et de poursuivre mes rêves. » Parmi ceux-ci : poursuivre la pratique de son sport en compétition en tant que femme trans et participer aux Jeux paralympiques.

Une transition qui réduit ses performances sportives

Le chemin n’a pas été un long fleuve tranquille. C’est en 2018 que Valentina a fait son coming out trans. La peur prédominait : dans sa famille, l’une de ses cousines avait été chassée de chez elle pour avoir expliqué qu’elle était une femme. Mais Valentina a voulu aller au bout, assumer qui elle était dans sa vie personnelle et sur les pistes d’athlétisme. En 2019, elle a entamé un traitement hormonal. Dont les effets se sont aussi ressentis très fort sur sa pratique sportive.

« Les premiers jours ont été très durs, décrit-elle encore dans le documentaire 5 nanomoles. Je n’imaginais pas que réduire le niveau de ma testostérone affecterait mes performances physiques. »  Elle a perdu très vite 10 secondes au 400 mètres, deux secondes et demi au 200 mètres… Mais pour elle, il n’y avait pas de doute à avoir : « Mieux vaut être une femme lente mais heureuse, qu’un homme rapide et malheureux », répète-elle à l’envi.

 
La difficile place des femmes transgenres dans les compétitions sportives

Le taux de testostérone dans son sang est descendu à moins de 5 nanomoles par litre. Un seuil important pour les sportives trans, souvent réclamé pour participer à des compétitions avec leurs consœurs. Aux Jeux olympiques et paralympiques, l’autorisation de participation des personnes transgenres est laissée à l’appréciation de chaque fédération sportive. En 2021, les Jeux olympiques de Tokyo ont ainsi accueilli pour la première fois une athlète transgenre, l’haltérophile néo-zélandaise Laurel Hubbard.

Du côté de l’athlétisme, la fédération internationale d’athlétisme, la World Athletics, qui ouvrait initialement ses compétitions aux athlètes transgenres en prenant en compte leur taux de testostérone, a finalement effectué un revirement en 2023. Désormais, elle interdit aux athlètes ayant transitionné après avoir connu une puberté masculine de participer à la catégorie féminine.

Faire front pour répondre aux critiques

Pour le bonheur d’une femme comme Valentina, le règlement de la fédération sportive internationale d’athlétisme handisport diffère. Pour combien de temps ? Le président du comité international paralympique, Andrew Parsons, déclarait à la BBC que Valentina Petrillo était la « bienvenue » aux Jeux paralympiques de Paris, mais qu’il  espérait que le monde du sport « s’unisse » grâce à la science concernant le règlement sur les sportifs et sportives trans pour « être juste avec les autres athlètes sur le terrain ». En Italie, Valentina Petrillo a dû endurer la pétition de plusieurs consœurs athlètes qui déploraient que « l’inclusion [ait] été privilégiée au détriment de l’équité », alors qu’elle avait commencé les compétitions en catégorie féminine en 2020.

Valentina Petrillo sait qu’elle sera sous les feux des projecteurs lors de ces Jeux paralympiques et pas seulement pour ses performances. Mais rien d’autre ne compte à ses yeux que sa participation, alors qu’elle avait manqué de peu d’avoir une place aux Jeux paralympiques de Tokyo en 2021. Une nouvelle occasion lui est donnée. À celles et ceux qui remettraient en doute sa présence, elle répondait à la BBC en août : « Il ne s’agit pas du choix d’un style de vie que j’aurais fait, [être une femme] est qui je suis. »

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