#METOOPOLITIQUE : « IL Y A QUELQUE CHOSE DE BRISÉ DANS L’EXERCICE DE LA DÉMOCRATIE »

Fiona Texeire #Metoopolitique
© Iris Texeire

Fiona Texeire, l’une des initiatrices de #MeTooPolitique alerte sur les violences sexistes et sexuelles subies par les femmes dans la sphère politique. Nécessaire à 6 mois de la présidentielle, ce mouvement invite à une réflexion salutaire sur la nature de la démocratie à venir.

Près de 300 femmes ont signé le 15 novembre une tribune appelant les partis politique à « écarter les auteurs de violences sexuelles et sexistes », une première étape qui lance le #MeTooPolitique. Fiona Texeire, collaboratrice d’élus témoigne de ces comportements banalisées. « Ça a commencé dans les 15 premiers jours de mon premier contrat de travail, j’avais 23 ans. Mais je n’ai pas mesuré la gravité de ce qui se passait. Je n’ai pas mesuré que ce comportement était illégal et je n’ai pas pensé qu’on pouvait faire autrement que de l’intégrer, de le subir » explique-t-elle. C’est seulement dans le déclenchement de #MeToo que la prise de conscience s’opère.

Les stratégies d’évitement sont insuffisantes à protéger les femmes qui travaillent avec les politiques en raison de l’organisation même du pouvoir analyse Fiona Texeire. « Les collaborateurs et collaboratrices d’élu.es sont tenus dans leurs contrats par une clause de loyauté. Le simple fait de manquer de respect ou de  » mettre en danger  » l’employeur a pour conséquence qu’elle n’incite pas du tout à parler. Les collaboratrices qui sont dans des procédures de harcèlement perdent leur emploi. Cela les plonge non seulement dans une insécurité économique, mais cela les prive d’une évolution et d’un parcours politique plus ambitieux ». Le rapport de force qui structure ces relations est propice à l’exercice des violences.

« Ne pas salir l’Institution »

De plus l’appartenance à un parti politique renforce le sentiment que sa prise de parole peut nuire à l’objectif collectif de l’institution. « Je ne voulais pas salir l’Institution à laquelle j’appartenais, je ne voulais pas faire de vagues alors que le moment politique était suffisamment dur. Personne ne se dit entre deux attentats en 2015 : « tiens si j’allais raconter mes conditions de travail « » lance Fiona Texeire. Une incitation à se taire pulvérisée par le mouvement #Metoo dans les années 2000.

Tardif ? Sans doute, mais d’un point de vue historique, la parole portée par les femmes est un fait récent. « Jusqu’en 1944 les femmes sont exclues du jeu politique et elles n’ont même pas accès aux institutions. Avec la parité au tournant des années 2000, elles entrent massivement au plus haut niveau de responsabilité politique et parviennent à pénétrer un peu le jeu politique » rappelle Fiona Texeire qui souhaite que l’ensemble des acteurs politiques prennent leur part de responsabilité. « Le choix des investiture relève des partis. En 2012 EELV fait le choix d’investir Denis Baupain en toute connaissance de cause, beaucoup de victimes auraient pu être épargnées s’il n’avait pas été promu à ce moment-là » commente l’intervenante à Science Po Rennes sur la question des violences sexuelles et sexistes en politique.

Les grandes lois qui ont concerné les droits des femmes depuis 50 ans ont été des lois portées par des figures politiques féminines. À l’exception de la loi Neuwirth, ces lois sont adossées à la présence de femmes en politique.

« Les femmes cherchent moins à conserver le pouvoir »

Sur la plateforme de recueil de témoignages, un formulaire est à la disposition des élus et notamment des maires investis du pouvoir de parrainage. Une responsabilité vis-à-vis des candidats à l’élection présidentielle qui devrait habiter les équipes de campagne, les députés et les cabinets ministériels. « Il faut réfléchir à qui on met à ces postes clés » argumente Fiona Texeire pour qui la classe politique actuelle ne mesure pas l’effet de ces comportements sur les plus jeunes, un électorat toujours à conquérir. « On va se retrouver avec un monde politique qui n’est pas du tout à même de représenter les attentes des jeunes électeurs et électrices ».

Les femmes « cherchent moins à conserver le pouvoir parce que l’expérience a été trop violente, de ce fait les sujets concernant les droits des femmes sont moins portés politiquement en raison de leur faible présence » souligne Fiona Texeire. Un effacement qui peut conduire à une abstention féminine plus « massive » lors des prochaines échéances électorales. « Il y a quelque chose de brisé dans l’exercice de la démocratie » conclut la co-initiatrice de #MeTooPolitique qui déplore qu’aucun membre du gouvernement n’ait signé la pétition en ligne à l’image de la la sénatrice écologiste, Mélanie Vogel qui a lancé lors des questions d’actualité au Sénat « Le silence gouvernemental blesse ».

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