COMMENT LA CAMPAGNE DOVE « IMAGE HACK » RECONSTRUIT L’IMAGE DES FEMMES DANS LA PUBLICITE

Image Hack la campagne qui bouscule les stereotypes feminins dans la pub
Image Hack la campagne qui bouscule les stereotypes feminins dans la pub

Depuis 2004, la marque de produits cométiques appartenant au groupe Unilever s’empare des complexes féminins pour des campagnes qui parlent vrai. Refusant la représentation de femmes objet imposée par les publicitaires, Dove met en valeur les femmes du quotidien avec leurs imperfections. Autrement dit nous. Exit donc les mannequins anorexiques. Interrogeant nos regards obsessionnellement négatifs, les campagnes Dove renvoient aux consommatrices l’image d’un corps à se réapproprier et à aimer. Avec ce premier slogan iconoclaste « Des millions de femmes raffermissent leurs rondeurs avec Dove dommage qu’on ne puisse pas toutes vous les montrer » le produit ne vante plus des résultats miraculeux sur les corps photoshopés de femmes de papier. Une audace payante dont la dernière illustration présente un caractère activiste auprès d’autres annonceurs. « Image_Hack », campagne pirate lancée avec l’agence Mindshare de Copenhague s’attaque à la source du mal en associant le tag « Beautiful women » à des images de femmes plus authentiques mises en ligne sur la plateforme photographique Shutterstock.

Dove élabore une stratégie au long cours dans la façon de se positionner et de s’associer à l’expression d’un regard sociétal plutôt féministe même si la finalité demeure l’augmentation de ses ventes de cosmétiques. Cet axe de communication fait suite aux résultats d’une étude mondiale diligentée par la marque en 2004. Sur un panel de 3200 femmes de dix pays, seules 2% d’entre elles se trouvent belles et 68% ne se reconnaissent pas dans la représentation féminine que les publicitaires distillent. Consternation. Le décalage de perception est immense. Dove s’engage alors dans une campagne qui prend en compte le physique « réel » de ses consommatrices pour redéfinir les canons de la beauté. Avec le slogan « Les vraies femmes ont de vraies rondeurs », la marque s’éloigne du stéréotype féminin supposé faire vendre – mince, blanche, jeune, sans ride, sexy -. Dans la foulée, Dove crée le « Fonds de l’estime de Soi » en 2006 avec l’objectif  de « donner à la prochaine génération de femmes les outils nécessaires pour construire une relation positive avec leur apparence, renforcer leur estime de soi et les voir se réaliser pleinement ». En 2013 la campagne « vous êtes plus belles que ce que vous croyez » conforte le message. Elle invite les femmes à poser un regard indulgent sur leur physique.

Le message prend à contre pied la communication des leaders du marché de la beauté. A l’injonction d’une beauté idéalisée, seul baromètre de valeur sociale, Dove répond avec le slogan « Pour toutes les beautés ». Pas de mannequins ou d’actrices sur les affiches, mais des femmes de toutes tailles et tous âges. Avec constance, au fil de campagnes, la marque choisit de s’attaquer à tous les sujets féminins occultés par ses concurrents. Après les complexes liés au surpoids, « Enorme ou pulpeuse ? Ridée ou radieuse ? » Dove commande l’étude « Beauty come on Age » en 2007. 91% des femmes âgées de 50 à 64 ans estiment que la question du vieillissement doit être traitée de façon positive dans la société. Et particulièrement par la publicité qui doit offrir une image plus réaliste de ce qu’elles sont. Des portraits de femmes matures fières de leurs rides et cheveux gris s’affichent sous l’objectif d’Annie Leibovitz.

 

En tant qu’agence nous jouons un rôle dans la représentation des genres proposée dans les médias. Quand nous utilisons des images qui ne sont pas le reflet de la société, des images qui représentent des femmes objets, nous imposons des idées irréalistes.

 

Kenneth Kaadtmann, directeur artistique de l’agence Mindshare à Copenhague.

 

En janvier de cette année Dove et l’agence de publicité danoise Mindshare deviennent activistes avec la campagne « Image_Hack ». En s’attaquant directement à la banque d’images Shutterstock utilisée par de nombreux publicitaires, ils entendent se jouer des algorithmes de recherche. Le tag « Beautiful women » retourne trop d’images de femmes à la beauté hypersexualisée. L’agence collabore avec des photographes qui produisent des images de femmes dans des situations non stéréotypées. Une mécano en bleu de travail dans un garage, une joueuse de rugby, une chasseuse avec chien et fusil … Toutes ces séries de photos ont été mises en lignes sur le site de Shutterstock à leur insu avec le mot clé associé « vraie femme » ou « belle femme ». Le site image_hack est crée. Un changement d’identification censé impacter les professionnels de la publicité. 42 annonceurs dont Ford, Frisko, DFB Pension, Panorm, Any Mac se sont joints à l’initiative et ont acheté des images pour leur propre campagne. 1729 images ont été mises en ligne grâce au travail de 97 photographes. 40 millions d’impression média n’ont toutefois pas convaincu Shutterstock de participer à l’opération. La banque d’images refuse désormais d’uploader les photos émanant des différents comptes créés par l’agence. Les photographes engagés dans la démarche poursuivent leur contribution à la campagne avec leur compte personnel.

 

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